Le principe
C’est un dispositif concret et fonctionnel que le public expérimente le troisième jour du mix.
Le prototype n’est pas un projet fini, même s’il fonctionne. Il est le fruit de trois jours de réflexion en commun avec son lot de contraintes, de consensus et de trouvailles.
Fabriquer des prototypes n’est pas l’objectif de Museomix en soi ; en revanche, c’est un défi qui encourage une équipe à travailler ensemble.
MUSEOMIX
Vie du prototype
Chaque prototype est documenté par son équipe de la manière la plus exhaustive possible, y compris avec son code source.
Dans l’idéal, le musée conserve les prototypes plusieurs jours après la fin de Museomix afin de les faire tester à son public. Puis, ils sont démontés. Un musée peut choisir de pérenniser un prototype : il s’engage alors à contacter l’équipe qui a développé l’idée originale pour lui proposer le projet. Le type de contractualisation entre le musée et l’équipe sort du périmètre de Museomix : c’est un accord à définir entre les parties concernées. Il faut savoir que la pérennisation demande un réel travail de développement à partir du prototype (ce n’est pas la “suite logique”).
Chercher un prototype
Depuis 2011, plusieurs centaines de prototypes ont été réalisés par les équipes de Museomix. Certains d’entre eux sont étrangement similaires… ou au contraire traitent la même problématique avec des approches complètement différentes.
De grandes tendances émergent : sur cette page, nous vous présentons une sélection de thématiques communes à plusieurs prototypes, à travers les villes, les éditions et les types de musée.
Sortir du musée
D’abord en montrant le musée grouillant d’une vie qu’il ne peut contenir : dans Les insomniaques du musée (Genève, 2014), les œuvres sortent dans la rue ou bien se penchent aux fenêtres du musée une fois la nuit tombée. Dans murMur (Lens, 2013), des briques interactives interpellent les passants !
On peut aller à la rencontre des collections sans mettre un pied dans le musée : dans Fenêtre sur le passé (Lyon, 2012), deux bornes communiquent entre intérieur et extérieur. Dans Musées à Images (Québec, 2013), c’est aussi une borne qui permet une immersion virtuelle dans le musée, depuis l’espace extérieur.
Mais toutes les tentatives de sortie visent aussi à faire entrer le passant : pour cela, on exploite la fibre émotionnelle avec Face à l’art (Montréal, 2015), en captant l’expression d’un visiteur devant une œuvre pour la partager à l’extérieur du musée. La même année, dans le même musée, une autre équipe vise plus large en rêvant à Cloud Art, un répertoire mondial d’informations, d’inspirations et d’émotions.
Repenser un principe
D’autres équipes explorent des partis-pris extrêmes pour faire vivre autrement l’expérience du musée. Avec Tire-toi une bûche ! Assieds-toi dans l’Histoire (Québec, 2013), la visite est sonore, tactile et olfactive uniquement. Elle s’adresse à un public non-voyant.
A Lens, en 2013, c’est un autre type de public spécifique que vise l’équipe : celui des enfants ! Avec son mobilier repliable, transportable et appropriable, La Jali est tour à tour objet, vaisseau de visite et application interactive.
Le musée social
C’est de loin l’envie la plus partagée des équipes de Museomix : faire parler les œuvres, parler avec les œuvres, parler des œuvres… Le musée est un lieu de rencontres, d’échanges et de débats.
Le traitement du sujet diffère dans la forme : plusieurs équipes, par exemple, ont eu l’intention de donner vie à une oeuvre qui interagit avec les visiteurs. Dans Rhinocéros détourné (Paris, 2011), on choisit de projeter directement sur l’œuvre grâce à la technologie du mapping.
Deux ans plus tard, dans le même musée, c’est une application mobile qui permet d’engager la discussion – avec Palabrama. Un an encore et on revient à un dispositif fixe sous forme de borne interactive : dans Rock on the rocks (Nantes, 2014) c’est une météorite qui nous parle au coeur des collections.
Mais point de futilités pour d’autres équipes qui défendent le musée comme un lieu public par excellence, une agora où l’on peut discuter des points d’actualité et s’exprimer dans ARTualité (Québec, 2013), où l’on évoque les sujets contemporains sans pincettes dans Breiz(h) à gratter (Rennes, 2015) et où l’on entretient la mémoire des générations passées dans L.O.C.O., Ligue Opérationnelle Contre l’Oubli (Arles, 2014).
Bien d’autres prototypes encore déclinent le thème de la conversation…
En immersion
Peut-on oublier le cadre du musée en vivant une rencontre avec les collections ? Depuis la première édition Museomix en 2011, les équipes recréent des mondes disparus pour immerger le visiteur dans leur ambiance.
Une première approche consiste à raconter des histoires, par le biais d’artifices, d’accessoires et de dispositifs. Dans Bruits de quartier (Lyon, 2012), c’est par une maquette que l’on s’introduit dans la vie quotidienne des habitants du quartier des Farges au 1er siècle. Dans La machine à contes (Grenoble, 2013), une table (tactile) font entendre les récits des Gens de l’Alpe. Dans Le Coquiphone (Nantes, 2014), on discute avec un coquillage comme on le ferait au téléphone. Dans Les Bruits qui Courent (Saint-Etienne, 2014), différents objets des collections (l’horloge pointeuse, le tiroir aux rubans…) dévoilent chacun une partie de l’histoire.
Dans une autre approche, c’est un personnage identifié qui nous guide : Jeanne Lanvin (Savez-vous garder un secret ?, Paris, 2011), le Baron Münchhausen (La Machine du Baron Münchhausen, Paris, 2011), les Visitandines du XVIIe siècle (Mur[murs], Grenoble, 2013) ou même Saint François de Sales (Lever les yeux, Grenoble, 2013) !
Une dernière approche consiste à étendre l’immersion à l’échelle d’une époque. Dans Archi + (Paris, 2013), on cherche à explorer le contexte social, culturel et politique des années 30 partir du travail de Michel Roux-Spitz. Deux ans plus tard, dans Le grand duc vol de nuit (Nantes, 2015), on replonge dans les années 30, cette fois à travers le quotidien des civils pendant la Seconde Guerre Mondiale.
Jeux de piste
En inventant des parcours de jeu, des énigmes, des défis et des récompenses, certaines équipes mêlent la découverte et le ludique.
Certains musées, comme les Arts Décoratifs à Paris ou le Musée de la Civilisation à Québec, ont été particulièrement inspirants pour les museomixeurs. Il plane une atmosphère mystérieuse dans ces prototypes volontiers mystiques, à en juger par leur nom : Opération Dragon, Il était mille fois, L’Art du Secret ou encore Le Secret du Lion.
Mention spéciale à l’équipe des Odonautes qui, en 2014 à Lille, ont imaginé avec The Dragonfly Horror Show une véritable expérience de storytelling, loufoque et décalée, en s’appuyant sur les codes de la série B.
Jeux d’arcade
A deux années d’écart, deux équipes ont adopté le même parti-pris envers la mosaïque : d’abord la transformer en terrain de jeu, ensuite s’y intéresser de plus près.
Au musée Arles antique (Arles, 2014), Aiôn’Snake est une rencontre entre la mosaïque d’Aiôn et le jeu mythique Snake. En gagnant les différents niveaux, le visiteur en découvre un peu plus sur cette scène de banquet romain.
Le public créatif
Essayer, inventer, triturer, bidouiller… Dans Museomix les équipes sont constituées de visiteurs de musée qui se projettent vers d’autres visiteurs, pour leur faire vivre des expériences décomplexées.
Les collections de costumes prêtent souvent au déguisement. Dans Les Dessous menteurs (Grenoble, 2013), le visiteur participe à un essayage intime qui se révèle être également public. Dans Costumix (Arles, 2014), on questionne le rôle social du costume, depuis l’Antiquité jusqu’à l’avenir.
A d’autres occasions, on utilise une collection pour la mixer et inventer de nouvelles images pour le musée, à la manière du cadavre exquis. Par exemple dans OiseauxMix ! (Nantes, 2014) ou dans Collage exquis (Montréal, 2015). Les créations sont des prétextes à la découverte : dans le premier cas, on aborde la classification animale en essayant de “ranger” son oiseau inventé. Dans le second, c’est le portrait que l’on s’approprie.
L’une des inspirations et success story de Museomix est probablement le prototype Pimp My Room, réalisé en 2011 à Paris et pérennisé depuis par le musée des Arts Décoratifs.
Parcours dans le musée
Différent de l’enquête (ou jeu de piste) qui s’appuie sur des ressorts ludiques, le parcours propose une cohérence, une suite logique, un cheminement dans le musée qui peut transformer le regard du visiteur.
L’une des manières de renouveler l’approche des oeuvres consiste à proposer un parcours thématique décalé. C’est ce que fait l’équipe du prototype #ohmydog75 (Paris, 2013) en suivant le motif du chien dans les collections permanentes. Une édition plus tard, l’équipe des Macrotiens (!) réalise MuseoZoom (Saint-Etienne, 2014), un dispositif qui invite le visiteur à photographier des détails de décoration sur les armes à feu des collections.
Le thème du super-héros est un grand classique : en s’emparant d’un objet totem, le visiteur se transforme et le musée devient tout à coup conçu pour lui, avec sa propre image et en vantant ses exploits. Trois équipes ont déjà expérimenté ce thème avec succès : Le Musée dont je suis le héros (Grenoble, 2013), Superhero visitors (Shropshire, 2013) et Flame to Fame (Nice, 2015).
Dans Icube (Paris, 2013), les oeuvres sont associées par similitude. Dans MAH Machine (Genèvre, 2014), on propose au visiteur trois éléments, piochés aléatoirement, auxquels il doit trouver un sens.
A l’inverse, dans Alice et le Minotaure (Genève, 2014), c’est le musée qui se recompose à partir du choix d’association du visiteur.
Le public en mouvement
A l’encontre des conventions du musée qui valorisent le calme, la tranquillité et le silence feutré, certains prototypes Museomix encouragent une dépense d’énergie pour aborder une oeuvre ou un objet de collection.
On manipule, on essaie, on teste… dans The Suck Squeeze Bang Blows (Derby, 2014) c’est le fonctionnement d’un moteur. Dans Museocyclette (Saint-Etienne, 2014), c’est l’histoire du Grand Bi que l’on parcourt en pédalant. Dans Préhistopiano (Rennes, 2015), ce sont des objets du musée de Bretagne que l’on découvre en jouant de la musique.
Dans Football Show (Nice, 2015), c’est l’histoire de l’évolution des ballons de foot que l’on décrypte à travers les jongles.
On les retrouve dans La danse serpentine (Paris, 2011), Esthétique du mouvement (Nice, 2015) et Oeuvre en mouvement (Montréal, 2015).